dimanche 4 juillet 2010

L'Olvig's addictions ! - Ray Lamontagne


Un grand mec sec et barbu à la voix éraillée. Voilà ce qu'on pourrait se contenter de constater quand on a l'occasion de découvrir ce type pour la première fois. C'est ce que moi j'ai vu, en tout cas. Voilà bien cinq ans, un soir de déprime télévisuelle, la main en goguette sur la zapette. Une émission culturelle de troisième partie de soirée, c'est dire à quelle point elle fut culturelle. Un présentateur à la voix d'homme en fer blanc, entouré d'empoussiérés bibelots de bibliothèque, lâche un : « Et maintenant, pour conclure cette émission, nous allons écouter Ray Lamontagne, présent sur notre plateau. Il est américain. Il vient de sortir son premier album, Trouble. Il va nous interpréter Hold you in my arms. Ray Lamontagne ! »
Applaudissements timides provenant d'un public passablement ensommeillés des discussions pompeuses qui précédaient cet instant. Et puis là, on tombe sur un trentenaire, blanc, chemise à carreaux, jeans usés jusqu'à la corde, beubar épaisse, guitare sèche à la main. On ne s'attend pas spécialement à entendre un truc comme ce qui va sortir de la gorge écarlate de l'inconnu. On s'attend à pas grand' chose, en fait. Et puis, voilà... Une voix puissante et fragile, comme si elle sortait d'un corps de plus soixante ans qui aurai enduré tabac et vieux whisky quotidiens depuis des origines adolescentes. Sauf que cet homme n'a qu'une trentaine d'années, déjà tannées par la vie. Et la chanson ?... un monument de cartes de jeu amoncelées. Un truc magistral qui semble ne reposer que sur très peu de choses. J'en suis comme deux ronds de flan devant mon tube cathodique. Pas le temps de remarquer une réaction du public de l'émission, je note son nom sur un bout de papier et foncerai quelques jours plus tard à la FNAC du coin. Depuis, je suis allé voir qui était le bonhomme, j'ai recherché la moindre note de musique enregistrée et j'attends avec l'avidité d'un toxico chaque petite info sur lui. Je suis devenu ce que j'ai toujours détesté voir chez les autres : un fan !


L'énergumène est originaire du fin fond de l'Amérique. Enfant élevé au milieu de ses 5 frères et soeurs(de pères différents)par sa mère, abandonnée par son musicien de conjoint, Ray Charles (son prénom complet) est un gamin solitaire hyper introverti. Il refuse son héritage artistique pendant des années, rejetant l'idée de vivre comme ce semblant de paternel. Et puis un beau jour, alors qu'il bosse comme ouvrier (surexploité, genre 60 heures la semaine) dans une usine de chaussures, il a une révélation en entendant une chanson d'un vieux song writer, Stephen Stills. Il décide de tout lâché, s'achète une gratte, et compose une dizaines de titres qui vont s'avérer être des petits bijoux dignes de vieux classiques de la folk amerloque façon Johnny Cash, Leonard Cohen, Neil Young ou Bob Dylan. Depuis il aura composé plusieurs autres titres d'anthologie. Au total, trois albums studio (Trouble, Till the sun turns black et Gossip in the grain) et un album live quasi introuvable puisque édité uniquement de l'autre côté de l'Atlantique (je ne l'ai trouvé qu'en import via le net, c'est dire)... et que des perles de zik parfois soul, parfois folk, parfois rock, parfois nostalgique, parfois contemplative, parfois fun... Je le considère comme un génie.
Ray est un type discret, timide (au point de ne se produire sur scène qu'avec lumière tamisée), sans chichis, presque autiste par moment mais il se soigne. Par la musique, en ne faisant que chanter sur la scène, pratiquement pas un mot de plus que des "thank you" à la fin de chaque titre. Un type qui ne s'exprime réellement que par son art, par ses textes ciselés, par cette voix intemporelle. Oui, vous l'avez forcément compris : j'en suis un adorateur inconditionnel.


En général, quand je dis aimer Ray Lamontagne, on me réplique « Ray qui ? »...Peu de publicité autour de lui, peu de passage télé. Sa renommée se fait par le bouche à oreille, à l'ancienne. Ceux qui l'aiment lui vouent presque un culte, ses shows se font dans l'esprit d'une messe tant on est sous le coup du halo qui se dégage de lui. C'est le genre d'artiste qui restera dans les livres et sur les vieilles radio blues de la route 66. C'est le genre d'homme qu'on aimerait tous avoir rencontrer avec une certaine forme de mysticisme.
Pour l'avoir vu à la Cigale, en septembre 2009 (une unique date française, complète en moins d'une semaine), un concert de Ray Lamontagne, c'est un événement qu'on vit comme le passage d'une comète, on admire, on savoure, on tente de chopper par-ci par-là des instants qu'on ne vivra peut être plus jamais. On se fabrique des souvenirs.
Ray Lamontagne, c'est l'exemple même de l'artiste que j'ai envie de devenir, un mec qui fait parler de lui sans attiré les regards indiscrets, un monstre de talent.

Il faut aller écouter ses titres comme How come, super entraînant, Barfly, planant, Meg White, hommage décomplexé faussement niais à la batteuse des White Stripes... C'est d'une efficacité folle.
Et puis n'hésitez pas à allez voir la multitude de vidéos qu'on trouve facilement sur YouTube : des covers de ses titres, des images de ses concerts, quelques unes de ses rarissimes interviews.
Pour le coup, je vous laisse regarder cet extrait d'un live pour BBC4, une merveille !

1 commentaire:

  1. C'est fou, mais la description de Ray Lamontagne est parfaite. Je regrette de ne pas l'avoir vu à La Cigale. Pour moi il a l'étoffe d'un grand. C'est un GRAND.

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