Lectrices, Lecteurs, bonne découverte !
Y a des soirs comme ça
On ne sait pas pourquoi,
On a une envie qui vient qui va,
Ça nous prend comme qui dirait par là. (Montrer le haut de son crâne de sa main)
L'envie de claquer tout ça,
De prendre un gun et de faire sauter la casbah,
D'exploser la tronche de ce gars, là-bas,
De faire en sorte qu'on ne soit
Plus vraiment soi...
L'envie de se la jouer Joe Pesci
Se mettre en costard à la mafiosi,
Se faire dorer le bling-bling un peu à la Sarkozy
Sans pour autant se faire tout rikiki.
Envie d'un p'tit chico en or, juste ici,
D'une montre un peu classe signée Gucci,
Quelque chose qui ferait qu'on me remarque, dans la vie,
Et alors que le type face à moi me cause du souci
Parce qu'il m'aura regardé avec un semblant de mépris
Je chopperais le premier stylo Bic qui traîne façon grigri
Et je planterais dans son œil droit la pointe qu'on use à l'écrit.
J'lui perforerai la gorge à ce dédaigneux Titi.
Il me tâchera de sang mon habit couleur de nuit
Et tandis qu'il crèvera, je l'engueulerai encore, l'abruti...
(Rire en « Hi ! Hi ! Hi ! », d'abord hystérique puis plus gêné. Enfin, se reprendre, un peu...)
Y a des soirs comme ça
On ne sait pas pourquoi,
On a de ces idées qui passent par là. (Montrer son crâne en se tapotant la tempe du bout de l'index.)
Ça nous vient d'abord du bout des doigts,
Puis ça envahit le cœur, le ventre et le bas
L'idée que mes couilles dirigent mes jambes et mes bras.
Qu'elles veuillent foutre en bouillie ce gars, là-bas,
L'idée que rien qu'une fois on ne soit
Plus vraiment soi...
L'idée qu'à la Steve MacQueen faudrait s'la jouer,
Réussir à faucher des clés, celles d'une bagnole sur le bas côté,
Tenter de décrocher un sourire à la blonde aux petits nénés,
L'emmener sans la forcer en voyage vers l'étrange contrée
Que décrivait dans ses bouquins Tonton Hemingway.
Et sans la prévenir faire des embardées
Juste parce que dans le rétro, on aura croisé
Le regard d'un type qu'on peut plus blairer.
Une main sur la cuisse pour la calmer,
Comme Maryline, elle commencerait à se marrer
Moi, j'sais pas pourquoi, ça me rendrai teubé
Et je ferai des blind pour l'épater,
Alors je pourrai plus rien contrôler...
Et c'est un platane, pas ses lèvres, que j'embrasserai.
(Rire en « Hé ! Hé ! Hé ! », d'abord hystérique puis plus gêné. Enfin, se reprendre, un peu...)
Y a des soirs comme ça
On se fout bien du pourquoi,
Y a un truc qui obsède d'un claquement de doigts...
Qui nous prend comme qui dirait par là. (Se frapper le haut du crâne avec la paume de sa main.)
Une sorte d'instinct qui guide nos pas,
Qui nous dit que la vie devrait pas être comme ça,
Qu'il faut buter sûrement mais bêtement ce gars, là-bas.
Qu'il faut qu'en fait, on ne soit
Plus vraiment soi...
L'envie de se la faire à la De Niro
Mine patibulaire et mains dans le dos
La bouche en coin, l'œil en bizot,
Dire à ce mec face à soi que ç'en est trop,
De le fixer bien dans les yeux, un peu de haut
Et lui cracher : « Hey ! Toi ! Ouais, toi ! Le gros !
C'est moi qu'tu regardes, pauvr' idiot ?
Tu vois pas que tu es sur ma route ? T'es mirot ?
Tu prends l'air fier ! Tu te crois costaud !
Limite, comment tu te sapes, on pense que tu te crois beau...
Tu te prends pour qui, espèce de nigaud ?
Pour le prince, un nabab, un gars des Soprano,
T'as beau te la péter, l'air de rien, ça s' voit : t'es un michto !
Par rapport à moi, crétin des Alpes, tu vaux zéro !
(Se montrer agressif avec le micro avec des « Ho ! Ho ! Ho ! », d'abord hystérique puis plus gêné. Enfin, se reprendre, un peu...)
Y a des soirs comme ça, ça serait trop beau
De laisser parler la violence qui habite notre cerveau.
De se laisser agir, de plus y aller molo,
De prendre une tête de turc, se le foutre à dos,
Vouloir qu'il y en ai un qui paye pour tous les salauds...
Et puis quand tu te décides à tout faire péter, tu fais le gros dos...
Puis tu regardes d'un peu plus près le rigolo,
Puis tu te dis qu'tu l'as déjà croisé le saligaud,
Puis tu réalises que dans le miroir, c'est toi, gogo !
(Ce texte m'a valu une grosse pénalité en Tournoi de Slam pour large dépassement des trois minutes réglementaires...)
Arrêtez ! S'iou plaît ! Mais... Rrrâh ! Arrêtez donc de m'regarder...
À la longue, vous vous doutez bien que vous me gênez !
J'ai bien vu, j'ai bien remarqué que vous me matiez.
Depuis tout à l'heure, depuis mon arrivée dans ce café,
J'ai senti les yeux de tout le monde sur moi se coller.
Je vous comprends, remarquez, et je sais ce que vous attendez...
Non, mais... Bien entendu ! Quoi ? Vous me croyiez demeuré ?
J'ai eu le temps de faire le tour de toute la salle d'un pas léger et
Je l'ai constaté, que j'étais la plus belle meuf du café.
La poire que vous vous payez...
C'est bien, vous vous la jouez mais
Je sais bien que je suis une beauté,
Vos regards n'ont de cesse de me le rappeler.
Les mains des uns rêvent de me palper,
La bouche des autres de m'embrasser,
Les mots des femmes de m'évincer.
Même toi, là, juste à côté, ton manège est bien rôdé !
Dés que j'ai eu le dos tourné tu n'as voulu que mon fessier.
Fais pas celui qui n'a rien capté,
Tu veux pas l'dire qu'j'te fais bander ?!
Ah ! Je sais ! Tu veux pas l'avouer
Parce que ta femme est là, juste à côté...
Non ? Ben, alors, vas-y, dis la vérité !
Ah ! La, la ! Les mecs, j'vous jure, des dégonflés !
Ça vous bave dessus en louzedé
Ça se fait des fixes sur votre décolleté
Ça se donne des coups de coude en vous traitant de traînée
Et face à vous ça assure autant qu'un plat à réchauffer... de chez ED.
Même pas capable d'assumer le fait
Que dans leur calecif ça sent le cramé...
Et puis, vous toutes, mesdames, avouez
Que vous enviez mes hanches bien dessinées,
Mes lèvres gourmandes, mes petits nénés,
Mes cheveux longs un peu décoiffés...
Je crois que si je n'étais
Pas aussi sympa, vous ne pourriez
Pas me piffer.
A voir vos têtes, tout de suite, j'ai deviné
que vous me trouvez imbu de moi-même et
Prétentieuse comme jamais.
Et je dois dire qu'il y a un fond de vrai
Dans ce que vous pensez.
Mais prenez un instant et imaginez...
Si ça se trouve, si j'étais un mec, je serai
beaucoup moins bien gaulé...
Mais là, à cet instant donné,
J'ai bien conscience qu'à vous parler
Comme je le fais
J'aurai pas besoin d'être beau pour que vous me regardiez.
Inventaire frigorifique
Au commencement, il n'y avait rien !
Et puis, lorsqu'on l'a ouvert
Pour en allumer la lumière...
On s'est mis à l'emplir
Selon notre désir...
Des pizzas marguaritas précuites
Des tupperwares hachis-parmentieurisés
De l'emmental au lait pasteurisé
Des yaourts vanille choco-pépites
De la bière blonde premier prix
Deux-trois tomates déculpabilisatrices
Quatre Danettes caramel tentatrices
Et de la mayonnaise aussi.
Pendant longtemps, de nouveau : Rien !
Et puis, on l'a rouvert
Afin de se satisfaire
De faire un peu illusion aussi
Afin que l'autre nous apprécie.
Une batavia pas défraichie
Un citron, du lait et des pêches
Des tagliatelles ciglées « fraîches »
De l'Actimel 0% goût kiwi
Des œufs bio vieux de deux jours
Un petit chablis pas cher
Du jus d'orange qu'on venait de faire
Et de la mayonnaise, toujours.
Et pour un temps, ce fut le train-train.
On l'ouvre de façon ordinaire
Sans trop faire de manière
Chacun se permet de faire cohabiter
Ses diverses denrées
Pour elle, du jus de goyave
Et de la cire à épiler
Pour lui, du chocolat au lait
Et du riz pilaf
A elle, des bâtons de surimi entamés
Et des graines de betteraves germées.
A lui, le vieux roquefort de chez Mémé
Et un pot de mayonnaise périmée.
Quand soudain on vida le tout, un jour chagrin
Parce qu'y a des fois, les DLV se dépassent
Pour le consommateur comme pour la boustifaille
Juste le temps qu'elle s'en aille
Lui voit s'effacer les traces
Plus de margarine anti cholestérol
Ni de barquette de fraises du Limousin
Pas plus encore de civet de lapin
Tout juste une courgette un peu molle.
Plus de tarama ou de saumon fumé
Et plus une goutte de soupe lyophilisée
Et à l'endroit où y avait des poissons panés
Reste juste un pot de mayonnaise vidé.
On dit souvent que l'appétit vient en mangeant,
L'histoire d'amour se ferait-elle en consommant ?
Il se retrouve seul, face éclairée par le frigo,
Pas sûr qu'il refera des courses de si tôt !
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